La crise économique historique que nous vivons et les recommandations des régulateurs bancaires ont compliqué l'accès aux crédit immobiliers pour de nombreux emprunteurs. Entre hausse de l'apport personnel et règles d'endettement plus strictes, les emprunteurs semblent avoir le dos au mur.
En juin, les taux moyens des crédits immobiliers se sont élevés en moyenne à 1,29% toutes durées confondues, selon l’Observatoire crédit logement CSA. Même s’ils s’éloignent de leur plus bas historique enregistré en novembre (1,12%), les taux restent aussi attractifs que ceux enregistrés en juin 2019, période marquée par des conditions d’emprunt exceptionnelles.
Malheureusement, tout le monde ne peut pas en profiter. Les banques, incitées aux principe de prudence en raison de la conjoncture actuelle régulent fortement les conditions d'accès à l'emprunt de sorte qu'un grand nombre d'emprunteurs se heurtent depuis peu à de nouvelles difficultés pour boucler leurs dossiers de prêts.
Des profils scrutés à la loupe
Depuis quelques mois, le développement du chômage partiel crée la suspicion chez les établissements de crédits. “De nombreuses banques sont sur le défensive, redoutant que ces mêmes ménages puissent demain basculer définitivement dans le chômage”, explique Gérard Skaf, directeur commercial au sein du courtier Immoprêt. Cette prudence généralisée est justifiée selon Maël Bernier, porte-parole du courtier Meilleurtaux : “On ne sait même jusqu’à quand l’Etat subventionnera le chômage partiel. La solvabilité des ménages est donc vraiment mise à mal.” En particulier pour certains profils travaillant dans les secteurs les plus touchés par la crise l'aéronautique, la restauration ou encore l’hôtellerie... Pour eux, souscrire un crédit dans les prochains mois sera au mieux très compliqué, au pire impossible. “Les employés d’Airbus étaient les clients les plus recherchés avant la crise. Il s’agissait de jeunes employés, aux salaires déjà costauds, avec de belles perspectives de carrière. Leurs dossiers sont maintenant examinés avec beaucoup de vigilance par les banques”, poursuit Maël Bernier.
Bercy en première ligne
Selon Gérard Skaf, directeur commercial d’Immoprêt, les consignes formulées par le Haut conseil de stabilité financière (HCSF) sont scrupuleusement appliquées par les établissements bancaires. A la fin de l'année 2019, cette instance présidée par le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a fortement recommandé aux banques de resserrer leurs conditions d’octroi de crédit. Le HCSF a ainsi convié les établissements bancaires à respecter la règle d’endettement de 33% de sorte qu'un emprunteur ne peut investir plus d’un tiers de ses revenus nets mensuels dans le remboursement de son crédit.
Des dégâts collatéraux
Les premières victimes sont de cette politique sont les investisseurs locatifs. Représentant un quart des acheteurs sur l'année 2019, soit une part "extrêmement haute" selon Gérard Skaf, ils demeurent des acteurs clés du marché de l'immobilier.
Or aujourd'hui, ils n’ont plus les moyens s’endetter à nouveau en raison des règles du HCSF, étant déjà confronté au remboursement de leur résidence principale. Il ne sont d'ailleurs pas les seuls à se trouver dans une situation délicate. De nombreux jeunes primo-accédants et ménages encore plus modestes ne disposant pas d’épargne suffisante devront s’acquitter de mensualités trop élevées pour eux, les excluant ainsi de la propriété.
Les exigences d’apport revues à la hausse
Les recommandations du HCSF et la perte de pouvoir d’achat des ménages ont poussé les banques à durcir les conditions d’octroi de leurs prêts immobiliers. Cela se traduit d’abord par la hausse de l’apport initial. La part des fonds propres avancés par les clients tournent dorénavant “autour de 15%”, précise Maël Bernier, ce qui représente une hausse sensible comparativement aux 10% que les établissements exigeaient jusque-là. “Les exigences sont les mêmes pour tous les profils”, rappelle Meilleurtaux. Chez Meilleurtaux, 50% des dossiers déposés en sortie de Covid le sont par des ménages de moins de 35 ans, et parmi eux, 40% ont moins de 5% d’apport. Pour eux, l’équation sera donc très compliquée. “Ces critères peuvent paraître durs, mais c'est quelque chose de tout à fait normal sur de nombreux marchés étrangers” nuance Gérard Skaf.
Source : Capital.fr